Lettre ouverte à Sophie Borderie, Présidente du Conseil départemental de Lot-et-Garonne


03 février 2022 - 2946 vues

« Madame la Présidente du Conseil départemental de Lot-et-Garonne, 
la LGV doit s'arrêter à Agen» 
Madame la Présidente, 
C'est avec préoccupation et inquiétude que nous vous écrivons suite à notre réunion du 2 février concernant le financement, par le département du Lot-et-Garonne, de la Ligne à Grande Vitesse entre Bordeaux et Toulouse et le risque, que nous ne pouvons écarter, d'absence de gare dans notre département. Comme nous vous l'avons précisé, cette décision serait lourde de conséquences pour les habitants et les entreprises du Lot-et-Garonne puisqu'elle pourrait conduire le Premier Ministre à renoncer à l'arrêt des TGV prévu en gare d'Agen. 
Vous nous avez précisé que le département estimait avoir fait le nécessaire en participant à hauteur de 35 M€ au financement du premier tronçon de la liaison Paris-Toulouse à savoir celui entre Tours et Bordeaux. Vous nous avez également précisé être favorable à la construction d'une gare LGV sur notre territoire. Enfin, vous avez partagé avec nous les nécessaires arbitrages entre les investissements qui sont de votre responsabilité, (collèges, routes, ... ) et cette participation financière à la future LGV. 

Ceci dit, acteurs économiques du territoire, nous considérons le moment comme historique: priver le Lot-et-Garonne d'arrêts LGV réguliers, à des horaires optimisés, serait une faute majeure, dont nous serions collectivement responsables si nous ne réagissions pas. Aucune politique, aussi brillante soit-elle, ne pourra apporter autant d'espoir et de potentialité que ce projet. 

Nous réaffirmons donc ici notre soutien à l'arrêt de la LGV à Agen : il s'agit d'une opportunité rare -comme il ne s'en présente qu'une fois par siècle- de renforcer l'attractivité du département et d'améliorer durablement la vie de ses habitants. 
Avec une dizaine d'arrêts TGV par jour, il est évident que le Lot et Garonne bénéficiera d'une plus grande accessibilité et attirera un nombre croissant d'entreprises, de salariés, d'étudiants, de professionnels de santé et de touristes. Les habitants et les acteurs économiques verront la diversité et la qualité des services s'améliorer sur le territoire. Les centres de formation, les zones d'activités et les pôles d'excellence se développeront et rayonneront bien au-delà du département. 
Nous sommes convaincus, Madame la Présidente, que c'est également la vision dynamique du territoire que vous souhaitez porter. 

Pourtant, par votre décision de ne pas contribuer au complément de financement du tronçon de la LGV Bordeaux-Toulouse, vous pourriez laisser passer cette opportunité et portez préjudice à l'avenir du Lot-et-Garonne, de ses habitants et de ses entreprises. 
Le Département du Tarn-et-Garonne a bien compris l'intérêt d'accueillir une gare LGV sur son territoire: il a pris un engagement ferme et définitif en faveur de l'arrivée de la LGV et soutient sans ambiguïté l'arrêt LGV en gare de Montauban. Pourquoi ne pas afficher le même volontarisme en Lot-et-Garonne? 
Allons-nous prendre le risque de laisser filer une infrastructure stratégique et un levier de développement territorial d'une telle ampleur? 
Nous avons déjà commis une erreur du même acabit à la fin des années 1970, en refusant collectivement toute centrale nucléaire sur le territoire, le résultat fût l'installation de la centrale à Golfech, à 25 km d'Agen sans aucune retombée économique pour le Lot-et-Garonne et un risque sanitaire équivalent en cas d'incident. Tâchons de tirer ensemble les enseignements du passé et saisissons aujourd'hui les opportunités d'avenir. 

Madame la Présidente, il vous est encore possible de reconsidérer votre positionnement en faisant de ce projet le vôtre, en le transformant en un projet exemplaire d'économie sociale et solidaire. 
Si vous faites le choix de porter cette ambition politique, la LGV pourra devenir un formidable chantier d'insertion pour les personnes éloignées de l'emploi, tant pendant la phase de construction que pendant la phase de maintenance. Le Département pourrait, par exemple, exiger qu'un nombre d'emplois en lien avec l'infrastructure soit accordé à des bénéficiaires du RSA et/ou de l'insertion par l'activité économique. Des passerelles peuvent également être imaginées avec les compétences du Département. 

Pourquoi ne pas envisager des visites scolaires et des événements d'orientation en lien avec le chantier de la LGV au titre de votre compétence dans la gestion des collèges? 
Pourquoi ne pas encourager une politique de tourisme durable en favorisant l'accès des touristes au territoire par la LGV? 
Pourquoi ne pas profiter de la LGV pour développer le tourisme agroalimentaire, agro­écologique et de savoir-faire? 
Le chantier LGV peut être une opportunité sans précédent de structurer des plans d'action ambitieux en termes de transition écologique, d'attractivité et de marketing territorial. 

Madame la Présidente, il vous appartient également d'exercer, grâce à votre contribution financière au projet LGV, la mission de tout Département en matière de solidarité 
territoriale. Notre département est l'un des plus pauvres de France et toutes les 
politiques, de droite comme de gauche, ont tenté d'enrailler cette triste réalité. 
L'enjeu de l'arrêt LGV en gare d'Agen dépasse l'intérêt de la seule agglomération agenaise: il est d'intérêt départemental. La gare LGV irriguera l'ensemble du Lot-et-Garonne, et notamment le Nord-Est du département, plus enclavé, par l'intermédiaire de la RN21 et du barreau de Camélat, projets dont le Département est un financeur. Elle permettra de libérer le réseau SNCF actuel pour développer le fret ferroviaire. Sans arrêt TGV à Agen et sans ligne aérienne commerciale vers Paris,_ tous nos vœux de désenclavement du Lot-et-Garonne auront été vains. 
Madame la Présidente, comme nous vous l'avons indiqué, nous vous invitons à voir cette lettre comme une main tendue. Il est désormais de votre ressort de la saisir afin de sortir de cette crise et de tout mettre en œuvre afin de ne pas passer à côté de cette opportunité. Comme nous vous l'avons indiqué, il est de notre responsabilité collective de dépasser toute considération partisane et de mettre toute notre énergie au service de ce projet structurant (comme l'a été l'A62 sans qui l'Agropole et ses 2500 emplois n'auraient jamais existé). Enfin, votre collectivité pourra également bénéficier de la dynamique économique du projet à long terme: avec l'arrivée de la LGV, les prix de l'immobilier et du foncier seront sans doute réévalués à la hausse, entraînant une augmentation des recettes fiscales pour le Département. 
Au nom des acteurs économiques du Lot-et-Garonne, nous vous sommes par avance reconnaissants du regard nouveau que vous voudrez bien porter à ce dossier dont le coût et le retour sur investissement doivent s'apprécier sur plusieurs décennies. 
Nous nous tenons à votre disposition pour toute réflexion ou action permettant de favoriser le maintien de l'arrêt des TGV à Agen. 

Veuillez croire, Madame la Présidente, à notre engagement commun et sincère pour le territoire

Frédéric Péchavy Président 
CCI Lot-et-Garonne

Jean-François Blanchet

Président CMA Lot et Garonne

Serge Bousquet-Cassagne Président 
Chambre d'Agriculture 47 

@Foto/ Erich Westendarp

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